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Une écriture de la liberté chez Juan Genet : analyse critique de Notre-Dame-des-Fleurs.

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2014

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Notre-Dame-des-Fleurs est le premier roman écrit par Jean Genet. C’est aussi, pour moi, le plus beau. Je suis donc en accord avec l’écrivain Jack Kerouac qui l’a décrit comme sa préférée des oeuvres de Genet. En effet, c’est grâce à Kerouac que j’ai fait ma première connaissance de Genet. En lisant une biographie de l’auteur américain, j’ai remarqué la mention de ce nom d’un écrivain inconnu pour moi : Jean Genet. Kerouac avait décrit le roman Naked Lunch de William S. Burroughs comme le plus beau roman qu’il avait lu depuis Notre-Dame-des-Fleurs (Kerouac 13). Ayant un respect énorme pour Kerouac et les autres membres de la Beat Generation, j’étais sûre qu’un auteur cité avec autant de louanges par lui méritait une recherche plus attentionnée. Je me suis donc mise à la découverte de l’écriture de Genet en commençant par ses romans et ses pièces. Plus tard je suis passée à sa biographie et à la critique de ses oeuvres. Certes, je me suis vite trouvée sous le charme de cet auteur impudent qui m’a séduite avec ses descriptions crues d’actes tabous, tout en appuyant sur leur beauté. Ce qui m’intéressait dès le départ était la force de son écriture, ayant le pouvoir de transformer sa réalité quotidienne. Trouvant sa naissance dans une cellule de prison, cette oeuvre est hantée par la pourriture et la solitude qui s’y trouvent mais, par son écriture, Genet arrive à transformer ces dégouts en beauté. Ainsi exploite-t-il « l’envers de [notre] beauté » en poursuivant son « destin dans le sens de la nuit, à l’inverse de [nous]-même » (JV 83). Si la poésie est, comme Genet la suggère, le fait « d’utiliser la merde et de [nous] le faire bouffer » (PF 683), quel banquet il nous offre ! Cette dissertation n’est pas pourtant une analyse de l’esthétique de Genet. Par contre, je vise à documenter une autre transformation offerte par l’écriture de Genet : celle de prisonnier en homme libre. Pour Genet, l’écriture est une manière de refuser « décidément un monde qui [l]’avait refusé » (JV 73) afin d’achever un niveau de liberté qui surpasse la réalité de son incarcération. Pendant que l’écriture de Genet occupe une place particulière dans la littérature et la critique, de nombreux théoriciens et chercheurs éminents l’ayant étudiée, j’ai trouvé un espace vide et j’ai eu le désir de le combler avec ma propre recherche. Les oeuvres de Genet sont souvent citées en tant qu’exemples de l’autofiction et plusieurs chercheurs font remarquer qu’il défie les normes sociales afin de défier les valeurs bourgeoises, mais, à ma connaissance, aucune étude n’a été menée pour situer son écriture dans le cadre de la postcolonialité. Cela me paraît surprenant, étant donné que son écriture traite des thèmes qui sont au coeur du projet postcolonial. J’avais aussi déterminé que le fait d’examiner l’aspect autofictionnel de ses oeuvres à travers les théories de la postcolonialité pourrait mener à des interprétations intéressantes. Cette analyse reprendra donc ces deux cadres théoriques en vue de montrer comment les techniques de l’écriture genetienne sont liées à sa libération de la domination exercée sur lui par l’État. Dans un premier chapitre qui s’intitule « Genet démasqué », je vais retracer la vie de Genet selon une perspective qui me sera utile dans la suite du projet : son enfance et sa jeunesse sont marquées par la domination des autorités. Puisque je traiterai dans les chapitres suivants de l’effort de Genet de surmonter dans son écriture cette domination, je me focaliserai dans ce chapitre sur l’effet qu’elle a eu sur sa vie. Il sera important d’illustrer pourquoi Genet s’efforce à se révolter contre la société française avant de déterminer comment il le fait. Je montrerai que la vie de l’enfant Genet a, à chaque instance, été réglementée par l’État. Le fait que Genet ait été enfant assisté et pupille de l’Assistance Publique est une réalité qui se trouve au centre de cette recherche. Il est donc important de décrire sa jeunesse pour montrer l’effet néfaste, mais finalement bénéfique si l’on considère son oeuvre, que les autorités ont eu sur sa vie. Je mettrai en question le système social qui a été mis en place pour traiter ces enfants et proposerai que le jeune Genet a été prisonnier dès l’âge de six mois, quand sa mère a attribué à l’État la responsabilité d’éduquer cet enfant. J’introduirai aussi dans ce chapitre les deux cadres théoriques qui fermeront la base de mon analyse : ceux de l’autofiction et de la postcolonialité. Puisque les deux sont des termes qui n’ont pas de définitions fixes, je considérerai leur apparition et leur développement dans la critique pour déterminer les théories qui sont pertinentes dans mon analyse. Dans le deuxième chapitre, « L’Autofiction. ‘Vraie ou fasse ? Les deux.’ », je vise à illustrer que l’écriture de Genet s’accorde au genre de l’autofiction, surtout si on prend en compte la définition de Lecarme et Lecarme-Tabon (1999). Ce chapitre sera une exploration des thèmes liés à l’autofiction comme ils apparaissent dans l’oeuvre de Genet. Je discuterai la notion de l’altérité, qui résulte de l’identité partagée entre auteur, narrateur et protagoniste, ainsi que l’ascétisme charnel de Genet, où je suggérerai que l’autofiction genetienne est une manière pour l’écrivain de se focaliser sur l’ontologie de l’homme qui est la source de son art. Après, le chapitre troisième, qui s’appelle « La Postcolonialité. Liberté, liberté chérie », sera une application des théories de Homi K. Bhabha sur l’écriture de Genet. Je montrerai comment Notre-Dame-des-Fleurs constitue un défi contre la société. En déstabilisant les opposés qui sont au coeur de cette dernière, Genet attaque les conventions sociales et les moeurs de l’Église catholique. Il s’affirme alors en dehors de la société et met en question le pouvoir que ces institutions exercent sur lui. Il détourne aussi les concepts traditionnels qui sont chers à la bourgeoisie et au Catholicisme pour les pervertir à sa façon. Ensuite, dans une conclusion qui s’intitule « Un Pouvoir en plâtre », j’analyserai les techniques de son écriture qui démantèlent l’opposition entre l’autobiographie et la fiction, une opposition qui se trouve au centre même de l’autofiction de Genet telle qu’analysée dans le chapitre troisième. Je montrerai pourquoi l’autofiction est pour Genet un tiers espace qui lui permet d’énoncer son émancipation de la société. J’expliquerai également comment son autofiction devient une écriture de la liberté.

Description

M.A. University of KwaZulu-Natal, Pietermaritzburg 2014.

Keywords

Genet, Jean, 1910-1986., Autobiographical fiction, French., Postcolonialism--France., French literature., French fiction., Theses--French.

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